• Essentialisation de son partenaire de discussion : pas bien...


    " 4e élément : Irrecevabilité a priori des éléments de preuve et disqualification essentialiste de la défense. (...)

    Autre élément participant à cette irrecevabilité a priori des preuves, c'est la disqualification du défenseur (et de ses preuves) au nom de son Essence ou l'essentialisation de la défense. En d'autres termes, les preuves ne sont pas recevables car celui qui les apporte est forcément suspect en raison de son appartenance à un groupe qui a intérêt à soutenir la thèse officielle. Lors des débats nazis sur la question juive, il est évident que les Juifs n'avaient pas droit au chapitre, car ils étaient partie prenante — on se souvient qu'Eichmann était considéré comme un expert en la matière ; au même titre que les 700 témoins de l'avion s'écrasant sur le Pentagone avaient tout intérêt à mentir car ils étaient liés au complexe militaro-industriel. De même, aucun virologue n'est légitime dès lors qu'il s'agit de discuter de la réelle dangerosité d'un virus car son expertise le disqualifie d'entrée de jeu (il a bien dû acquérir cette expertise quelque part, ce qui détruit sa prétention à la neutralité). C'est là un arsenal pseudo-argumentaire qui — même s'il repose sur une sophistique ultra-violente — est très efficace. Son efficacité réside justement dans cette non-réciprocité ; il neutralise toute possibilité de dialogues, renforce dans leurs convictions ceux qui sont convaincus et ne laisse aucune possibilité d'échange avec ceux qui ne le sont pas. C'est un discours fondé sur l'exclusion ; c'est l'antithèse du dialogue puisqu'il va jusqu'à nier radicalement la subjectivité de l'adversaire (un élément qui souligne sa parenté avec le négationnisme, avec lequel il se confond de plus en plus). Il alterne les registres de la mauvaise sylllogistique, de l'argument ad hominem, du passionnel ; il saute de l'un à l'autre en ne laissant aucune chance à l'adversaire et en conservant l'initiative, à moins de se voir opposer un adversaire d'égale mauvaise foi."

     

    Extrait de "Notes sur une possible épistémologie conspirationniste" par Pierre Chevalier paru dans la revue n°3 de Ulenspiegel, automne 2020. à suivre ici : 1e élément : La Méthode tronquée (ou Descartes à la carte) - 2e élément : Déhiérarchisation des éléments probatoires - 3e élément : Renversement de la charge de la preuve